Par Omar ER-ROUCH

Marrakech- Ambassadrice itinérante de la haute couture marocaine, Kenza Melehi s’est donnée pour mission de préserver le patrimoine vestimentaire marocain et de le présenter avec une mode tendance qui va de pair avec les styles occidentaux. L’objectif ultime étant de sublimer la femme en partant de sa beauté extérieure pour attiser sa force intérieure.

Native d’Asilah, Mme Melehi découvre une vraie passion pour le monde de la mode dès son adolescence. Une sensibilité et une passion qui la conduisent à quitter le Maroc vers le Canada pour intégrer une école de stylisme dans la ville de Montréal.

“Ma passion pour la mode et le stylisme a commencé depuis mon plus jeune âge grâce à mon entourage familial artistique. Très vite, on m’a mise dans le bain des couleurs, des formes… de la création artistique de manière générale. J’étais également fascinée par les magazines de mode que je transportais sous mes bras durant les années de scolarisation”, se rappelle avec nostalgie Mme Melehi dans un entretien accordé à M24, la chaine télévisée de l’information en continu de la MAP, à l’occasion de la célébration de la Journée internationale des femmes

Dans son atelier, logé dans un riad hérité de l’époque saâdienne au cœur de l’ancienne médina de Marrakech, Mme Melehi confie son admiration pour les grands designers Italiens et Français, qui ont cultivé chez elle cette culture de l’élégance, du raffinement et de l’excellence.

“Pour réaliser ce rêve d’adolescente, je me suis envolée pour le Canada afin d’intégrer une école de stylisme, faire un travail de recherche et partir à la découverte des différentes richesses du monde de la mode”, se rappelle-t-elle de ses débuts, tout en affirmant que cette quête du savoir, “née d’une volonté de lier mon héritage marocain à ce que pouvait m’offrir l’Occident, nous fait grandir en s’épanouissant avec le temps afin d’arriver à une satisfaction personnelle et celle de mes clients”.

Aujourd’hui, ses clients se trouvent partout dans le monde, surtout en Grande-Bretagne, où elle a enchainé les défilés de mode pour mettre en avant un savoir-faire marocain ancestral, notamment à travers le caftan, repensé par l’aiguille magique de Mme Melehi.

Outre les caftans, la designer marocaine travaille sur les robes du soir, les gandouras, les chemisiers, les châles, les capes, les “serouals” (pantalons)… Une gamme riche et variée où s’expriment les finitions raffinées et les matières nobles. “Je pense mes créations pour permettre à la femme de les porter en toute occasion et à toute heure du jour ou de la nuit à travers le monde”, explique Mme Melehi, fière de laisser une empreinte singulière aussi modeste, soit-elle, sur la mode de haute couture, qui rend hommage au patrimoine culturel du Royaume.

Ses créations sont coupées avant d’être remises entre les mains des maâlems et des brodeuses. Les broderies et les passementeries sont travaillées telles des œuvres d’art ou des bijoux et incrustés de manière à dessiner une ceinture ou un pendentif.

“J’imagine des collections où s’expriment des matières moins conventionnelles pour donner naissance à des créations qui se rapprocheraient de l’installation artistique”, se félicite Mme Melehi, fortement imprégnée des œuvres de son frère, le célébrissime Mohamed Melehi, un artiste cosmopolite qui a exercé une influence considérable sur le cours de l’art contemporain marocain.

Ainsi, les créations de Mme Melehi ne sont jamais identiques. “Je ne crée jamais la même chose. Autrement je m’ennuie. Ainsi, mon client est réassuré de porter des pièces uniques”, affirme la styliste qui s’est installée dans la Cité Ocre où, elle puise son inspiration et présente ses collections.

Concernant les matières, Mme Melehi est très sélective. Des tissus typiques des différentes régions du Royaume, du brocard de l’Angleterre, du Cotton de l’Inde, de la soie de l’Italie ou de France… Dans son atelier qui respire l’histoire et l’art, les matières se croisent et rivalisent de noblesse et de raffinement.

“Dans mes créations, je fais appel à des matières importées du vaste monde, mais j’essaye sans cesse de ne pas oublier mes ancêtres. Le rappel se fait au niveau de la broderie, de la passementerie, des motifs et des couleurs”, relève Mme Melehi entourée de ses chères brodeuses.

La styliste est ainsi très engagée dans la mission de préserver le patrimoine marocain, “un travail continuel dans l’innovation, la création et la transmission du savoir-faire indigène aux Marocains d’abord, car il ne faut pas oublier notre histoire et en être fière et connaître notre pays avant d’aller chez les autres”, préconise Mme Melehi, se disant très fière du patrimoine marocain “particulièrement riche que ça soit aux niveaux architectural, pictural, artistique, culinaire ou vestimentaire”.

“Bien connaître ce patrimoine vestimentaire, son histoire et sa richesse, avoir le troisième œil (œil artistique), avoir un esprit critique pour accepter les feed-back et un esprit de recherche et de curiosité par rapport à ce qui se passe ailleurs, sont les clés de la réussite des futures stylistes”, selon Mme M. Melehi, qui conclut en adressant un message aux femmes marocaines “courageuses”, “travailleuses” et “ambitieuses” : “il faut croire en vos rêves. Faîtes des études et trouver votre voie”.