Par Abir HASSANI

 

Rabat – La Journée internationale contre les violences faites aux femmes (25 novembre) est célébrée cette année sous le signe de l’union contre ce fléau et de la sensibilisation à ses répercussions financières et sociales et aux efforts déployés au plan national et international pour y faire face.

Dans le cadre d’un plaidoyer pluriannuel lancé en 2008, l’ONU mène une campagne de “16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre à l’égard des femmes et des filles” du 25 novembre au 10 décembre, une initiative placée cette année sous le thème “Tous unis: Investir pour prévenir la violence à l’égard des femmes et des filles”.

À l’échelle mondiale, ONU Femmes estime que 736 millions de femmes, soit une femme sur trois, ont été victimes de violence physique et/ou sexuelle de la part de leur partenaire intime, de violence sexuelle d’un autre partenaire, ou des deux, au moins une fois dans leur vie.

Dans un message publié sur le site Web des Nations Unies à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a appelé à “renforcer les investissements dans la prévention et le soutien aux organisations de défense des droits des femmes” et à “soutenir les militantes et mettre en avant le rôle clef des femmes à tous les stades de la prise de décision”.

A l’échelle nationale, le Maroc est largement engagé dans la lutte contre la violence faite aux femmes et filles sous toutes ses formes depuis les années 1990, un combat qui mobilise gouvernement, acteurs de la société civile et forces vives de la nation.

Sur le plan législatif, la loi n °103-13 sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes, entrée en vigueur en septembre 2018, a constitué une étape importante dans la promotion de la condition de la femme marocaine à tous les niveaux.

Au niveau institutionnel, l’Observatoire national de la violence à l’égard des femmes a été instauré en 2014 en tant que mécanisme national rassemblant partenaires institutionnels, collectifs, chercheurs et experts sur le sujet, dans le but de surveiller et d’enquêter sur les différentes formes de violence faites aux femmes.

Par ailleurs, et dans le cadre d’un partenariat entre le ministère de la Solidarité, de l’Insertion sociale et de la Famille et les associations œuvrant dans le domaine, 44 espaces multifonctionnels pour les femmes (EMF) ont été créés, offrant des services pour protéger les femmes victimes de violence.

A ces démarches s’ajoute le nouveau programme “Al Jisr pour l’autonomisation et le leadership” qui a permis la mise en place d’un incubateur social dans les EMFs pour fournir des soins aux femmes victimes de violence et les accompagner sur la voie de l’intégration sociale et économique.

Point d’orgue de cet élan national contre la violence à l’égard des femmes, le projet de révision du Code de la famille, conformément à la Haute teneur de la Lettre Royale adressée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI au Chef du gouvernement, constituera sans doute un grand pas en avant pour corriger les dysfonctionnements observés à ce niveau.

Malgré les progrès accomplis dans le domaine législatif, le chemin vers l’élimination des violences faites aux femmes demeure long et parsemé de défis multidimensionnels.

Dans une déclaration à la MAP, Fatiha Chtatou, avocate et ex-présidente du réseau Injad contre la violence basée sur le genre, considère que “la loi seule n’est pas suffisante pour une lutte efficace contre ce fléau”.

Rappelant que le Maroc a ratifié plusieurs accords internationaux liés aux droits des femmes et a levé ses réserves au sujet de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW), Mme Chtatou souligne la nécessité d'”une approche holistique englobant les aspects social, culturel et économique” pour faire face à la violence contre les femmes, un fléau qui coûte cher à notre pays.

En 2019, le coût économique de la violence physique et sexuelle contre les femmes et les filles a été évalué à 2,85 milliards de dirhams, selon une note du Haut Commissariat au Plan (HCP).

Ce coût englobe, entre autres, l’accès aux services de santé (986 millions de dirhams), les procédures judiciaires conséquentes (124,5 millions DH) et la perte de jours de travail rémunérés des femmes victimes (281,2 millions DH).

A cet égard, Mme Chtatou déplore que la violence basée sur le genre continue de constituer “un obstacle au développement”. “Sans la protection et la promotion des conditions des femmes et des filles, on reste dans l’incapacité d’honorer les engagements du développement sur tous les fronts”, indique-t-elle.