Rabat – Les intervenants lors d’une table-ronde organisée jeudi à Rabat ont estimé que la promotion des droits des femmes et leur implication effective dans le processus de changement et de développement que connaît la société sur tous les plans, nécessite une approche renouvelée garantissant une convergence des dimensions juridique, politique, économique et aussi sur le plan des droits de l’homme.
Dans leurs interventions lors de cette table-ronde organisée sous le thème ”La femme, d’un sujet du système juridique à une actrice pour son changement et développement” par le ministère de la Justice, en partenariat avec la Chambre des conseillers, ils ont souligné que la défense des droits de la femme représente l’un des principaux défis dans le Maroc de demain, notant que la transition d’un statut où la femme est sujet du système judiciaire à celui dans lequel elle s’impose comme une actrice de changement et de développement, suppose que l’accès de la femme à ses droits juridiques ne soit pas dissocié de son accomplissement sur tous les autres plans, notamment dans dans les domaines économique et politique.
Pour le président de la Chambre des conseillers, Naama Miyara, la représentativité politique des femmes et le challenge de la parité supposent la mise en place d’une approche renouvelée reposant sur la convergence des dimensions inhérentes au développement, aux droits de l’homme et au champ politique et ce, pour que l’autonomisation totale des femmes ne reste pas confinée dans le domaine des statistiques mais pour qu’elle puisse, tout au contraire, déboucher sur une participation équitable et effective des femmes à la hauteur de leur statut social.
Et d’ajouter que l’autonomisation politique des femmes ne se limite pas seulement à sa participation et son accès aux institutions politiques mais qu’elle se mesure surtout au niveau de sa participation effective à la prise des décisions. Un objectif dont la réalisation bute encore contre des contraintes liées à la fois à la culture et aux structures sociales, a-t-il fait observer, avant d’indiquer que la Chambre des conseillers est un espace de délibérations et de dialogue sur les moyens favorisant l’accès des femmes à la justice et son développement.
Il a rappelé, à ce propos, les avancées réalisées par le Royaume et les acquis sans précédent, sous la conduite éclairée de SM le Roi Mohammed VI, dans le domaine des droits des femmes, notamment des réformes en faveur de l’égalité des sexes, l’augmentation de la représentativité des femmes sur le plan de la prise des décisions dans les domaines politique, administratif et économique ou encore l’amélioration de la condition des femmes sur le plan de son inclusion sociale ainsi que la scolarisation en hausse des filles dans le monde rural.
De même, le président de la Chambre des représentants, Rachid Talbi Alami, a affirmé que la consécration constitutionnelle des droits de la femme est un des principaux fondamentaux en faveur de l’amélioration de sa condition, ajoutant que la Constitution du Royaume réserve une place prépondérante aux droits de la femme, conformément aux dispositions inscrites dans les chartes internationales.
Dans une allocution lue en son nom par le premier vice-président de la Chambre, Mohamed Sebbari, il a fait savoir que le parlement marocain a adopté des lois consacrant la place centrale de la femme exerçant dans le domaine de la justice comme une actrice du changement et du développement, notamment la loi organique N° 100.03 relative au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire qui fixe le nombre des sièges réservés aux femmes juges parmi les dix membre élus audit Conseil, de manière à refléter parfaitement leur présence dans le corps judiciaire.
Le président de la Chambre des représentants a également évoqué les grandes avancées réalisées par le Maroc sur le chemin de la consolidation du processus démocratique et la réduction des disparités et de la discrimination fondée sur le genre et ce, grâce à des réformes constitutionnelles, législatives et juridiques en phase avec les conventions internationales.
Pour sa part, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, a d’emblée mis en avant les améliorations notables réalisées sur le plan de la condition de la femme qui lui ont permis d’occuper des postes de responsabilité, assurant que cette amélioration ira crescendo au vu des immenses potentialités dont dispose le Maroc, à condition de faire montre d’audace et d’honnêteté.
Il a, néanmoins, estimé qu’en dépit des acquis enregistrés sur le plan de l’autonomisation politique, sociale et juridique de la femme, il n’en reste pas moins que des contraintes subsistent, notamment sur les plans de la scolarisation et l’accès à la justice, surtout au sujet du mariage des filles mineures.
Il a ainsi déploré le fait que l’accès de la femme à la justice reste encore de faible importance, surtout dans le volet financier, insistant sur la nécessité de réviser les textes réglementaires qui minimisent le rôle de la femme dans la société et empêchent encore son accès à la justice, outre l’application effective du principe de la discrimination positive.
Autre intervenant, le Procureur général du Roi près la Cour de Cassation, président du Ministère public, El Hassan Daki, qui a affirmé que la société ne peut évoluer sans l’instauration d’une réelle parité Homme-Femme.
Tout en relevant que le contexte actuel dans le Royaume inscrit sous le signe du Nouveau Modèle de Développement exige une participation effective de la femme dans le processus de développement, il a mis en avant l’apport prépondérant des réformes structurelles engagées dans le pays en matière de droits de l’homme et tout particulièrement sur le plan des droits des femmes.
Et de faire remarquer que les femmes s’imposent aujourd’hui dans tous les domaines, y compris ceux qui étaient jadis du ressort exclusif des hommes, s’imposant également grâce à leurs compétences dans le domaine de l’entreprise sur le plan international, autant d’indicateurs qui illustrent, à ses yeux, l’importance des acquis réalisés.
De son côté, Mohamed Abdennabaoui, président délégué du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, a souligné que l’amélioration de la condition de la femme passe par la consécration du principe de la parité et l’adoption du principe de la discrimination positive en faveur de la femme, avant d’estimer que la nomination des femmes aux postes de responsabilité ne devrait pas reposer sur leur sexe mais sur leurs capacités et leurs compétences.
Dans une allocution lue en son nom par Latifa Taoufiq, directrice du pôle des affaires juridiques au Conseil supérieur du pouvoir judiciaire, il a indiqué que le nombre des femmes exerçant dans le domaine de la justice a connu ces dernières années une augmentation notable tant sur le plan de l’accès à la justice que sur celui de l’exercice de responsabilités sur les plans national et international. Il a ainsi révélé que le nombre des femmes juges se chiffre actuellement à 1.860 sur un total de 4.218 juges.
Il a, par ailleurs, noté que le nombre de femmes juges occupant des postes de responsabilité au niveau de la présidence des tribunaux ne reflète guère leur présence quantitative et qualitative, expliquant cela par le fait qu’elles prennent peu l’initiative de postuler à ce type de postes, ce qui a amené le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire à donner des instructions favorisant la parité à travers l’incitation des femmes juges à soumettre leurs candidatures et ce, en raison de leur apport dans la promotion du processus de réforme.
Destinée à évaluer la situation de la femme sur le plan de l’accès à la justice et à quantifier les opportunités offertes en faveur de la promotion du rôle de la femme en tant qu’actrice principale dans le développement des mécanismes du système judiciaire, cette table-ronde a été marquée par le lancement d’une plate-forme numérique réservée à un débat national sur l’accès de la femme à la justice au Maroc.
Cette rencontre-débat s’est déroulée en deux séances, l’une consacrée au thème ”L’état des lieux de l’accès de la femme à la justice: expériences nationales et internationales”, et l’autre sur le thème ”Participation de la femme dans le développement des mécanismes du système judiciaire”. Une occasion de sensibilisation au respect du genre social à l’adresse des institutions et autres acteurs concernés par l’égalité des sexes et la lutte contre la violence à l’égard de la femme.