– Par Ilias Khalafi –
Johannesburg – En Afrique du Sud, pays meurtri par tant de violences, le féminicide demeure cette plaie qui défigure la société et à laquelle le gouvernement n’a pas encore su apporter de remède.
Si la violence dans le pays Arc-en-ciel est devenue une norme sociale dans un contexte de crise, celle à l’encontre des femmes a pris ces dernières années des proportions alarmantes au point de susciter l’ire de la société.
Des ONG et des citoyens avaient, à plusieurs reprises, dit leur ras-le-bol et manifesté leur colère dans la rue face à l’inaction de l’exécutif qui a, jusqu’ici, fait preuve d’indifférence à l’égard de la souffrance des femmes. Ces dernières sont, en effet, exposées à un degré de violence inouïe dans un pays où une femme est tuée toutes les trois heures selon des chiffres de la criminalité révélés par le ministère de la police.
C’était le sort de Tshepo Rakoma, une Sud-africaine de 32 ans qui a été tuée, il y a quelques semaines, par balles en plein public par son conjoint dans la ville de Polokwane (300 km de Pretoria). Ce meurtre sordide a secoué l’opinion publique locale d’autant plus que la victime est mère de trois enfants.
Les médias et les réseaux sociaux sud-africains pullulent d’histoires tragiques comme celles de Rakoma, impliquant des femmes de tous âges, assassinées par des hommes.
En 2020, près de 2.700 femmes ont été tuées alors que le pays était soumis à un confinement strict. La situation des femmes est devenue encore plus fragile dans un contexte de crise sanitaire, marqué par la pandémie du Covid-19. Du coup, les priorités du gouvernement ont changé d’un cran avec une plus grande attention pour le système de santé et l’ouverture économique. La défense des droits des femmes, elle, est renvoyée aux calendes grecques.
Dans un entretien à la MAP, la présidente de l’Association sud-africaine «Women Lead Movement», Melene Cynthia Rossouw, a fait constater que la violence à l’égard des femmes avait déjà atteint des proportions de crise avant même la pandémie, mais les restrictions imposées dans le cadre du confinement ont exacerbé une situation déjà désastreuse.
«L’Afrique du Sud a la honteuse réputation d’être l’un des endroits les plus dangereux au monde pour une femme», a regretté Rossouw qui s’active dans la promotion de l’égalité hommes/femmes et la lutte contre la violence basée sur le genre (VBG) à travers les programmes d’éducation et de sensibilisation destinés aux populations locales.
Elle a indiqué que dans ce pays d’Afrique australe, «une femme sur cinq âgée de plus de 18 ans a subi des violences physiques et une femme est assassinée toutes les trois heures».
Décidément, si la violence sexiste est un problème qui n’épargne aucune société dans le monde, en Afrique du Sud ce phénomène prend une ampleur exceptionnelle.
Selon des analystes, ce fléau enraciné dans la société sud-africaine est une manifestation de l’inégalité entre les sexes qui sévit dans les secteurs de l’éducation, la santé, la politique et l’économie, entre autres.
Ils expliquent que la violence sexiste est plus répandue dans les sociétés où règne une culture d’acceptation de la violence, où la supériorité masculine est considérée comme la norme et où les femmes sont considérées comme ayant une valeur et un pouvoir sociaux de second plan.map parité
Dès lors, lutter contre la violence à l’égard des femmes en Afrique du Sud s’avère une tâche des pus difficile. Les campagnes visant à changer les mentalités et les attitudes sociales nécessitent de nombreuses années avant de porter leurs fruits.
En attendant une réelle volonté politique du gouvernement pour venir à bout de la violence sexiste qui gangrène la société sud-africaine, les femmes continueront de supporter le poids d’une crise exacerbée par la pauvreté, le faible niveau d’éducation et le chômage des jeunes.