Par : Hajar Erraji

Rome- Taux de fécondité en repli, âge moyen de maternité plus élevé…Les berceaux se vident en Italie, déjà connue pour être le plus vieux pays d’Europe. Simple report de l’entrée en parentalité ou choix de ne pas être parent ? L’inquiétude pour la santé et l’aggravation des conditions économiques, dues essentiellement à la pandémie, semblent impacter le désir d’avoir un enfant en Outre-Alpes. Mais pas seulement ! L’incertitude et la violence pèsent lourd sur les Italiennes.

L’an dernier, la population de la péninsule s’est réduite de presque 400.000 unités, plus ou moins l’équivalent d’une ville comme Florence, pour tomber à 59,3 millions, alors que le nombre de morts explosait et les naissances plongeaient.

“La situation est alarmante. Nous faisons face à une vraie crise démographique, amplifiée par un baby-crash, jamais vécu depuis la seconde guerre mondiale”, a signalé à la MAP le sociologue Marco Antici.

Outre une stagnation économique et un marché de l’emploi sclérosé, la crise sanitaire a fortement contribué à cette chute des naissances, selon l’expert, relevant que la crainte de se retrouver au chômage, le stress et la perte de confiance en l’avenir sont autant de facteurs qui hantent les Italiens.

Mariana, jeune femme, mariée depuis trois ans, le confirme. “La pandémie a bouleversé tous nos plans. Mon mari a perdu son travail et a dû remuer ciel et terre pour en trouver un après un an !”, s’est-elle confiée à la MAP, avec une voix cassée qui cache mal sa détresse.

Pour cette belle Italienne, le désir de maternité a été sacrifié sur l’autel du Covid-19. “Je suis persuadée de ne pas être la seule dans cette situation”, a-t-elle lancé avec beaucoup de regret.

“Il serait toutefois hasardeux d’attribuer à la pandémie l’unique responsabilité d’une éventuelle baisse démographique. La courbe de la fécondité avait déjà commencé à baisser cinq ans avant la pandémie”, a rebondi le sociologue.

D’après M. Antici, la violence conjugale, qui prend parfois des formes assez graves, sème également l’incertitude et le rejet au sein des couples Italiens. “Comment ces femmes battues où harcelées peuvent-elles avoir envie de donner la vie? Je signale que 116 féminicides ont été commis en 2021, dont 100 ont été perpétrés dans le contexte conjugal ou affectif”.

La lutte contre les violences faites aux femmes est, depuis quelques années, un enjeu de société en Italie. Le 9 août dernier, un nouveau “Code Rouge” contre les violences conjugales est entré en vigueur.

L’expert évoque également le manque d’aide sociale, les conditions de logement difficiles et la baisse des flux migratoires, soulignant que la crise démographique relève de plusieurs facteurs, ce qui nécessite une étude approfondie et globale pour stopper “cette bombe à retardement de long terme”.

Si la baisse constante de l’indicateur conjoncturel de fécondité (ICF) peut paraître anodine à court terme, les véritables répercussions de ce phénomène ne pourront s’apprécier que dans plusieurs décennies. Et les conséquences pourraient s’avérer très coûteuses, a-t-il averti.

Conscient de l’enjeu, le Premier ministre, Mario Draghi, avait mis en garde en mai dernier qu’’’une Italie sans enfants (…) est une Italie qui finit lentement d’exister’’.

Il a, en fait, promis davantage de crèches, des aides pour les femmes qui travaillent, des allocations familiales et des facilités d’accès aux prêts immobiliers pour les jeunes couples.

L’Italie semble décidée à prendre la problématique à bras-le-corps. Le plan de relance consacre une enveloppe de 221 milliards d’euros pour élargir sa progéniture.