Monastir- Ahlam Aboulamal, cette native de Casablanca en 1978 et établi en Tunisie depuis 2006, à Monastir à 160 km de Tunis, ville natale du leader Bourguiba, est une femme habitée par le monde des arts et du spectacle.

Son itinéraire atypique le prouve amplement. Cette directrice de l’espace théâtre “Ruspina” à Monastir, a réussi la gageure d’accomplir de grandes ruptures dans sa carrière, ne craignant ni à faire bouger les lignes, ni à remettre en question certaines idées reçues et encore moins à emprunter des chemins autres que les sentiers battus.

Son dynamisme débordant, son engagement et son amour pour l’art et ses diverses expressions se présentent comme la meilleure thérapeutique pour cette jeune femme pour être en parfaite harmonie avec sa vocation.

Sa grande sensibilité pour le théâtre a marqué sa rupture avec le domaine des maths et physiques, auquel elle était pourtant prédestinée au début de son cursus d’enseignement.

Ce n’est certainement pas par hasard que cette jeune lycéenne, section sciences et mathématiques dans un lycée de Casablanca, puis étudiante, deux ans durant, en maths physiques, abandonne les sciences exactes pour succomber au 4ème art, “père de toutes les autres expressions artistiques”, confite-t-elle à la MAP.

Le premier virage l’a conduite à l’école supérieure de communication et de publicité à Casablanca. Il fut suivi d’une virée en Egypte, où elle a fait office de free-lance, assurant la direction artistique dans plusieurs projets publicitaires et de création de contenus vidéo.

Le second virage dans sa carrière, qui fut plus intense et riche, coïncida avec son établissement en 2006 en Tunisie pour rejoindre son conjoint.

Depuis cette date son aventure se poursuit de plus belle, sa vocation s’est affermie et sa passion pour le domaine des arts s’est encore fortement approfondie.

Pour cela, elle commença par le commencement, en choisissant la voie de l’apprentissage. Pari gagné après avoir décroché un master en beaux-arts à Sousse (arts du spectacle), un diplôme qui a beaucoup changé sa vie.

Désormais, l’art du spectacle devient une composante essentielle de son quotidien et une passion qui ne la quitte pas. Déterminée, Ahlam Aboulamal, prépare actuellement une thèse de doctorat à l’institut des arts dramatiques de Tunis.

Avec ce cursus riche et ce cheminement, plein de rebondissements, le théâtre, le 4ème art “au confluent de toutes les expressions artistiques”, a été le catalyseur de ses réussites.

Réussites qu’elle attribue “à un engagement, une passion, une confiance et une satisfaction que cet art m’a procurée”, dit-elle. Pour elle, la raison est simple, “avec souvent de petits moyens, on arrive à monter de grands projets et créer de bons contenus”.

Manifestement, 2008 marque l’amorce d’une dynamique vertueuse dans sa carrière avec son entrée à l’Espace Théâtre Ruspina à Monastir, un projet culturel alternatif initié par des particuliers et qui a rapidement rencontré l’adhésion des jeunes et des moins jeunes dans la région et aussi un rayonnement aussi bien sur le plan national qu’international.

Petit projet devenu, en un laps de temps court, grand, non par la taille mais par sa portée, les contenus qu’il est parvenu à promouvoir, le concept qu’il a offert et l’ouverture qu’il a lancé en direction d’une population cible formée essentiellement de jeunes écoliers.

2010-2011, le projet dont Ahlam Aboulamal est à la fois la cheville ouvrière et la directrice, a acquis de nouveaux moyens et une nouvelle dimension. Le grand déclic est venu surtout après “ma participation à Hanovre, en Allemagne, à un grand festival culturel”.

Le projet qui a tout le temps caressé son esprit a pris forme. Elle est l’initiatrice du théâtre de poche. Dans l’Espace Théâtre “Ruspina”, elle a ciblé particulièrement les jeunes (à partir de 4 ans) du quartier populaire d’El Bassatine “non pas pour former des acteurs, mais pour leur permettre d’être en harmonie avec le milieu dans lequel ils vivent, de communiquer mieux et de s’intégrer dans leur environnement”.

La réussite a été à la mesure de l’engagement et de l’enthousiasme de cette femme, dont la vie est rythmée par les activités artistiques et qui n’hésite pas à faire le tour des écoles et des maisons de culture pour apprécier de visu ce que formateurs et jeunes écoliers entreprennent en parfaite symbiose.

“L’année 2016 a été l’année des marionnettes”, nous confie Ahlam Aboulamal. L’entreprise consiste à disséminer cet art dans les écoles primaires environnantes et les maisons de culture. La première concrétisation de ce travail assidu fut le lancement 2015-2016 de la première session du théâtre des marionnettes.

Fort de ce succès, la deuxième session 2018-2019 mobilisa 40 établissements et pas moins de 400 enfants. Ce processus a été couronné par le lancement du festival international Monastir capitale de la marionnette.

L’itinéraire d’Ahlam Aboulamal a franchi en 2018 un nouveau palier, avec le lancement du projet Mémoire et, en même temps, du festival international de l’art du conte.

“Une session constitutive qui a rencontré un franc succès avec la participation de 5 pays dont le Maroc qui a volé, à cette occasion, la vedette par la qualité de sa présence.

Le projet Mémoire a été une nouvelle aventure aboutie. Elle a permis à la directrice de l’Espace Théâtre “Ruspina” d’assurer la formation des jeunes aux techniques et pratiques du conte.

“Pas moins de 39 écoles, 73 ateliers de formation et 800 jeunes ont pris part à ce projet”, exprime avec fierté Ahlam Aboulamal. Une fierté, qui traduit une expérience réussie, intense et une confiance grandissante des partenaires internationaux dans ce projet culturel atypique.

Il faut noter qu’Espace Théâtre “Ruspina” est soutenu par “Tfanen_Tunisie_Créative”, un organisme, financé à hauteur de 9,7 millions d’euros par l’Union Européenne et qui promeut la diversité de l’action culturelle et artistique.

Une confiance, dont Ahlam s’enorgueillit et qui ne peut que renforcer sa détermination et son engagement pour que toutes les expressions artistiques fleurissent et que le plus grand nombre de jeunes, quel que soit le milieu auquel ils appartiennent, adhèrent sans retenue.

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