-Par Naoufal Enhari-

Nations-Unies (New York) – La participation pleine et effective des femmes à la vie publique à travers le monde et l’élimination de la violence et des discriminations les touchant sont les mots d’ordre de la 65è session de la Commission de la condition de la femme – CSW65 – qui se tient de manière hybride aux Nations-Unies à New York (15-26 mars).

La première semaine des travaux de cette commission a été l’occasion pour plusieurs hauts responsables des Nations-Unies et représentants des Etats membres de mettre un accent particulier sur l’importance cruciale de hisser les droits des femmes, étant donné leur rôle de premier plan au sein de la société et dans la réalisation du développement durable.

Et pour cause. Le constat au niveau mondial est choquant : les femmes sont largement exclues de l’exercice des plus hautes responsabilités, en ce sens qu’elles ne comptent que pour un quart des parlementaires, un tiers des élus locaux et un cinquième des ministres de la planète.

Le monde risque de ne pas être en mesure de réaliser l’Agenda de développement durable à l’horizon 2030 “sans garantir la participation pleine et effective des femmes et la prise de décisions dans la vie publique, ainsi que l’élimination de la violence partout”, a averti le président de l’Assemblée générale des Nations-Unies, Volkan Bozkir.

“Ici, dans cette salle (de l’Assemblée générale), nous avons le pouvoir de créer un monde meilleur pour tous. L’Assemblée générale elle-même représente ce que beaucoup pensaient impossible, il y a soixante-quinze ans”, a lancé M. Bozkir.

“Aujourd’hui, je vous exhorte à faire preuve d’audace. Pour rendre possible, ce que certains peuvent juger «impossible»”, a-t-il lancé à l’ouverture de cette session de la Commission qui a pour thème prioritaire : “Participation pleine et effective des femmes à la prise de décisions dans la sphère publique, élimination de la violence, réalisation de l’égalité des sexes et autonomisation de toutes les femmes et de toutes les filles”.

De son côté, la Directrice exécutive d’ONU Femmes, Mlambo-Ngcuka, a rappelé que le leadership féminin est un accélérateur. “Là où les femmes dirigent, elles peuvent être un accélérateur et un catalyseur importants pour l’égalité des sexes partout”, a-t-elle assuré.

Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a, pour sa part, constaté que seulement vingt-deux pays dans le monde sont dirigés par une femme. “Et au rythme actuel, la parité au niveau des chefs de gouvernement ne sera pas atteinte avant 2150”, a-t-il regretté.

“Vous avez bien entendu : encore 130 années dominées par des hommes qui prendront le même genre de décisions qu’ils ont prises depuis les 130 dernières années, depuis toujours”, a dit le chef de l’ONU devant les représentants des Etats membres à New York.

Pour M. Guterres, lorsque les femmes ne participent pas à la prise de décision, “nous ne voyons le monde que sous un seul angle”.

“Nous créons des modèles économiques qui ne mesurent pas le travail productif qui a lieu au sein du foyer. Nous créons des fora numériques avec des biais masculins intégrés dans le code même. Nous voyons des décisions qui menacent les efforts déployés pour garantir le plein accès aux services et aux droits de santé sexuelle et reproductive. Et nous dépensons des milliards de dollars pour des armes qui ne nous protègent pas, tout en négligeant les violences subies par une femme sur trois dans le monde”, a-t-il fait valoir.

Par conséquent, “il faut à tout prix rebattre les cartes, changer de logiciel”, a plaidé le chef de l’ONU.

La Vice-présidente américaine Kamala Harris, la première femme à occuper ce poste aux Etats-Unis, a tenu à livrer personnellement le discours national de son pays devant la Commission de la condition de la femme. Dans un message vidéo, Mme Harris a ainsi souligné “la condition de la femme est la condition de la démocratie”.

Pour elle, la démocratie protège les droits de l’homme, maintient l’Etat de droit et est un moyen de partager la prospérité, dans laquelle chacun a une voix égale.

La Vice-Présidente américaine a également averti que la démocratie est de plus en plus mise à rude épreuve dans un monde connaissant “un déclin troublant de la liberté”. “Même si nous sommes confrontés à une crise sanitaire mondiale et à une crise économique, il est essentiel que nous continuions à défendre la démocratie”, a-t-elle dit.

“La condition de la démocratie dépend aussi fondamentalement de l’autonomisation des femmes”, a souligné Mme Harris, notant que la participation des femmes à la vie publique renforce la démocratie.

Même son de cloche chez la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, qui a estimé que le fait de donner aux femmes et aux filles les moyens de participer pleinement à la vie publique est à la fois la chose bonne et intelligente à faire.

Michelle Bachelet a cité des preuves démontrant de manière concluante que là où les femmes sont bien représentées au sein d’un gouvernement, il y a plus d’investissement dans la protection sociale et une meilleure focalisation sur la justice climatique.

De même, leur participation aux pourparlers de paix est liée à des solutions plus durables, tandis que les femmes à la tête du secteur privé conduisent à de meilleures performances commerciales sur de nombreux paramètres, a-t-elle fait valoir.