Rabat – L’essai “Fatema Mernissi, le fil invisible du féminisme” du psychiatre et psychanalyste Ahmed Farid Merini, relate la rencontre avec l’icône du féminisme Fatema Mernissi, pour la découverte des secrets féminins enfouis dans les pictogrammes du tapis de Taznakht.

Cet opus de 87 pages (format moyen), paru aux éditions Marsam,  reprend les dialogues entre Fatema Mernissi et l’écrivain dès leur première rencontre en 2005, qui se voulaient une analyse des significations féminines des pictogrammes du tapis de Taznakht et une révélation des rapports socio-psychologiques qui s’en dégagent.

La trame de ce livre repose, selon l’auteur, sur la manière dont Fatema Mernissi met en exergue les processus de subjectivation mis en scène à travers des pratiques comme la broderie ou le tissage, en adoptant une démarche qui s’inscrit dans des positions à la fois sociologique, féministe et écrivaine.

En effet, la broderie, cet art ancré dans la société traditionnelle marocaine, est l’un des moyens d’expression d’une rébellion des femmes et d’une quête de libération des “hudud” (limites) imposés par la société patriarcale, comme le tapis de Taznakht, dont les pictogrammes inscrits sur sa surface, cachent un secret dont le déchiffrage passe par une transmission mère-fille.

Pour Fatema Mernissi, le tissage, bien que différent de la broderie dans sa pratique et dans sa symbolique, renvoie à son enfance passée dans un harem au milieu des brodeuses, évoquées dans son livre “Rêves de femmes” paru en 1997 et traduit dans une vingtaine de langues.

Dans son essai, Farid Merini relate sa rencontre en compagnie de Fatema Mernissi avec des tisseuses de Taznakht, à savoir la grand-mère Ijja Ait Said, Mbarka sa fille et Fatema Raji sa petite-fille, qui est chargée de traduire en arabe les propos de sa grand-mère et de sa mère qui ne parlent qu’en Amazigh.

Les tapis de Taznakht, avec des motifs de losanges, damiers, croix, étoiles ou zigzags répartis selon une structure symétrique autour d’un centre, détiennent des significations variables associées à un ensemble de croyances magiques et à une fonction sociale de protection par la “baraka” ainsi qu’au mauvais-œil, explique l’auteur dans son livre.

L’essai “Fatema Mernissi, le fil invisible du féminisme” contient de surcroît des images de tapis traditionnels de Taznakht, d’alphabet tifinagh et samarien ancien, d’une broderie rbatie réalisées par Lalla Ghita Regragui, mère de l’auteur, des symboles utilisés dans la broderie de Taznakht, comme l’oiseau (Taboumedat), l’étoile (Itr) et la tortue (Tafcrunt) ainsi que leurs significations.

Le lecteur peut également découvrir des photographies de la rencontre de Fatema Mernissi avec “les tisseuses de rêve”, outre des photos souvenir en hommage à cette icône du féminisme marocain.

Née à Fès (1940-2015), Fatema Mernissi a étudié à Rabat puis à Paris (Sorbonne) et aux États-Unis où elle a obtenu, en 1973, son doctorat en sciences humaines. A partir des années 1980, elle a enseigné à l’université Mohammed V de Rabat.

En 2003 elle a reçu le prix des Asturies en littérature et en 2004 le prix Erasmus aux Pays-Bas pour le thème “Religion et modernité”.

Ahmed Farid Merini est docteur en médecine, psychiatre et psychanalyste. Il est membre fondateur et président de l’Association des Amis du centre Fatema Mernissi pour l’animation culturelle (AACFMAC). Il est également membre fondateur de la chaire Fatema Mernissi et membre fondateur et président de la société psychanalytique marocaine (SPM).

L’auteur a, en outre, codirigé plusieurs ouvrages, dont “L’étranger et ses lieux” (Fondation Ona-Villa des arts, 2017) et “Trauma et créativité” (Université de Paris, 2021).