Casablanca- Les participants à une rencontre sur le mariage coutumier des enfants, organisée en célébration de la journée internationale des droits de l’Homme ont plaidé, mercredi à Casablanca, pour la mise en place d’actions socio-juridiques pour faire face au mariage coutumier des enfants.
Lors de cette rencontre, tenue à l’initiative du Fonds des Nations unies pour la population (FNUAP), du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’ONU Femmes et de l’association INSAF sous le thème “Regards croisés : le mariage coutumier, une réforme juridique nécessaire”, les participants ont également mis l’accent sur les avancées réalisées dans ce cadre, notant toutefois la nécessité de redoubler d’efforts pour éradiquer ce phénomène.
S’exprimant à cette occasion, la présidente d’INSAF, Meriem Othmani a salué l’ensemble des actions militantes du tissu associatif œuvrant aussi bien dans le plaidoyer que sur le terrain, mettant l’accent sur l’effet bénéfique de toutes les actions entreprises par les partenaires nationaux ou internationaux lesquels ont soutenu et continuent à soutenir les initiatives et les programmes initiés par la société civile.
Mme Othmani a également fait savoir que les filles en particulier dans les villages enclavés du monde rural ont peu de chance de poursuivre leurs études, expliquant que l’éloignement des collèges et le manque d’internats les condamnent à rester chez elles et à faire face au danger lié au travail et au mariage précoce.
“Si nous abordons le problème des mariages coutumiers nous nous rendons compte avec effroi des conséquences désastreuses pour la vie des enfants nés de ces unions et de la précarité juridique imposée aux femmes”, a-t-elle déploré, rappelant que la procédure du mariage est claire et exige 2 adouls, une dot, le consentement des époux et l’enregistrement de l’acte.
S’agissant de l’expérience de l’INSAF, Mme Othmani a rappelé que plus de 550 fillettes ont été remises à l’école, en les sauvant du mariage précoce ou d’un travail en ville, soulignant qu’elle a pu convaincre les parents en prenant en charge les frais de leur scolarité.
Ces fillettes sont devenues des jeunes filles qui étudient à la faculté ou qui poursuivent des formations professionnelles, s’est-elle réjouie.
Pour sa part, le représentant du Fonds des Nations Unies pour la Population au Maroc, Luis Mora a mis l’accent sur l’importance de fédérer les efforts afin de mettre fin à une pratique néfaste qui touche plus de 650 millions de femmes et de filles dans le monde.
Et d’ajouter que de nombreux accords internationaux existent concernant la condamnation du mariage des enfants, rappelant que la Conférence internationale sur la population et le développement de 1994 a notamment lancé un appel aux différents pays afin de mettre un terme à cette pratique.
Les filles contraintes à un mariage précoce tombent souvent enceintes très tôt, alors qu’elles sont encore adolescentes, ce qui augmente le risque de complications lors de la grossesse ou de l’accouchement, a souligné M. Mora, relevant que ces complications figurent parmi les principales causes de mortalité chez les adolescentes entre 15 et 19 ans au niveau mondial.
Les jeunes filles mariées peuvent également contracter des infections sexuellement transmissibles, comme le VIH et faire face à plusieurs dangers mettant en péril leur droit à la vie, à la santé et au bien-être, a-t-il dit.
Lorsque les filles sont mariées jeunes, elles sont aussi souvent forcées à abandonner l’école. Le mariage des enfants se solde régulièrement par un déni du droit à l’éducation. Les jeunes filles déscolarisées ont davantage de problèmes de santé, outre des perspectives économiques moins bonnes, a déploré M. Mora.
De son coté, la représentante du ministère de l’insertion sociale et de la famille, Karima Hliouti a mis l’accent sur les efforts déployés par les autorités et les institutions publique pour préserver le noyau de la famille qui constitue le pilier de la société.
Mme Hliouti a, de même, fait savoir que dans ce sillage, le ministère de tutelle accorde un intérêt particulier à la famille particulièrement les personnes en situation de précarité, précisant que le Maroc a ratifié les accord liés aux droits de l’enfance et les politiques gouvernementales comportent une vision intégrée en faveur des femmes en général et des filles en particulier.
Les politiques publiques intégrées pour la protection de l’enfance sont notamment dynamisées par les institutions et structures territoriales pour préserver les enfants notamment contre le mariage coutumier ou les abus sexuels, a-t-elle ajouté.
Leila Rhiwi, représentante d’ONU-Femmes a plaidé, pour sa part, pour le respect de l’âge légal du mariage à savoir 18 ans, rappelant que le cadre légal en vigueur réglemente ce sujet, mais prévoit une exception qui autorise le mariage des jeunes filles.
La responsable onusienne a insisté, dans une déclaration à la MAP, sur l’importance du changement des mentalités pour promouvoir les conditions des jeunes filles.
Quant au directeur de l’Académie régionale de l’éducation et de la formation (AREF) de Casablanca Settat, Abdelmoumen Talib, il a exposé les avancées enregistrées en matière de scolarisation des filles et les actions mises en place pour leur offrir les meilleures chances.
M. Talib a également évoqué les campagnes de sensibilisation organisées au sein des établissements scolaires et le rôle des cellules d’écoutes dédiées à faciliter l’accès des filles à l’école et lutter contre la déperdition scolaire particulièrement dans les zones rurales.
Les jeunes filles en situation de précarité bénéficient également de structures d’accueil mises à leur disposition pour poursuivre leur cursus scolaire, a-t-il dit.
Il a également salué les efforts consentis par les cadres de l’AREF Casablanca-Settat dans la dynamisation de la réforme mise en place par le département de tutelle en vue de faire de l’éducation et de la formation un levier de développement au profit des élèves et des jeunes filles en particulier.
Par ailleurs, le responsable a salué le rôle des femmes dans l’AREF Casablanca-Settat qui font preuve d’un grand savoir-faire en tant que directrices d’écoles ou responsables au sein des services de l’académie.
Dans son dernier rapport “Vers l’élimination du mariage des enfants, Tendances mondiales et profils de progrès”, présenté en octobre 2021, l’UNICEF estime qu’environ 650 millions de filles et de femmes vivant aujourd’hui ont été mariées avant leur 18ème anniversaire.
Le programme mondial visant à mettre fin à cette pratique dans les pays à très fort taux de prévalence, dont le lead et la gestion au niveau global sont assurés par l’UNICEF, avec la participation du FNUAP et ONU Femmes, a montré que plus de 12 millions de filles de la population du monde sont mariées chaque année avant d’atteindre l’âge adulte, soit une fille sur cinq.