Rabat- Un féminicide, un décor de Rabat des années 1970 et des personnages mi-réels mi-fictifs: ce sont les ingrédients que Bouchra Boulouiz a mélangés avec subtilité pour donner naissance à “Clara”, son premier polar dont la cérémonie de signature et de présentation s’est déroulée mardi soir à Rabat.

Paru aux éditions Marsam, le roman de 158 pages de format moyen n’est pas qu’un thriller haletant. Tout en respectant les codes du genre avec une bonne dose de suspens et d’émotions fortes, l’auteure se sert de l’intrigue pour relater les grands événements ayant marqué la vie politique et sociale de l’époque, et aborder, mine de rien, des sujets des plus sérieux tels que le sous-développement, les enjeux démographiques et la situation des femmes.

C’est l’histoire d’un meurtre mystérieux dont le théâtre est Rabat et dont la victime est une diplomate répondant au nom de Clara H. Après avoir participé à une conférence internationale sur la population mondiale tenue dans la capitale, la jeune femme, ouvertement féministe, est retrouvée morte, jetée dans un puits dans la nécropole de Chellah.

Mort accidentelle ou homicide ? Et à qui profiterait le crime ? L’enquête policière est confiée au très professionnel et sympathique Commissaire Mohssine qui doit faire appel à tout son savoir-faire pour percer le mystère de cet odieux crime. Au fil de l’enquête, riche en révélations, le lecteur suit le policier dans les dédales de Rabat des seventies, tantôt dans le brouhaha et la promiscuité de l’ancienne médina, tantôt dans le calme plat des quartiers huppés. Un périple aussi fascinant qu’instructif et une merveilleuse mise en contexte qui font tout le charme de ce polar typiquement marocain.

“’Clara’ est ma première expérience en matière de romans policiers. A travers l’histoire d’une diplomate retrouvée morte, j’emmène le lecteur dans une visite dans la ville de Rabat des années 1970 qui est mise en scène en même temps que l’enquête. La trame se construit autant autour de l’enquête que des lieux. Cela me fait beaucoup de plaisir de pouvoir partager avec le lecteur un regard différent sur la capitale”, a déclaré Bouchra Boulouiz à M24, la chaîne d’information en continu de la MAP.

En s’essayant pour la première fois au roman policier, un genre qui est né et qui s’est développé en Occident, l’écrivaine dit vouloir “montrer que la criminalité est un phénomène qui existe dans toutes les sociétés et que les criminels sont partout, mais on n’en parle pas beaucoup dans notre production littéraire”.

S’agissant de l’idée du roman, elle affirme ne s’être pas inspirée d’un fait-divers. “On a toujours un pied dans le réel, un autre dans l’imagination. Chacun de nous vit dans cet équilibre, dans la mobilité mentale et psychologique entre ces deux mondes. En ce qui concerne “Clara”, tout le patchwork des personnages qui le peuplent est le fruit de mon imagination, mais pas que. Pour une description réaliste des caractères, j’ai bien sûr fait appel à mes expériences de vie et mes observations. Parfois, pour bien situer les événements dans leur contexte temporel, je retravaille des personnages qui ont réellement existé”.

Pour Mohamed Abderrahman Tazi, le roman de Bouchra Boulouiz se situe “à la frontière entre le réel, l’imaginaire et le réel rêvé”. “C’est cette fusion qui donne naissance à l’œuvre créative, qu’elle soit littéraire, cinématographique ou picturale”, a-t-il indiqué lors de la cérémonie de présentation.

La rencontre, qui s’est déroulée à la Villa des arts, a été marquée par la présence d’intellectuels, cinéastes et critiques.

“Clara” est le premier titre d’une série policière de l’auteure, intitulée “Les enquêtes du commissaire Mohssin”.

Native de Ben Ahmed, Bouchra Boulouiz est diplômée en sciences politiques et en sciences économique de l’université de la Sorbonne. Après une riche carrière comme conseillère en communication auprès de plusieurs départements ministériels, elle s’est consacrée à l’écriture. Romancière, chercheur et essayiste, elle a notamment publié “Juda, l’ambassadeur et moi” (2004), “Rouge Henné” (2010) et “Un parfum de menthe” (2019).